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Þingvellir, histoire et archéologie

Þingvellir (se prononce thingvetlir) est l’un des sites historiques les plus importants d’Islande.

Ces paysages ont été le théâtre d'événements qui constituent le cœur de l'histoire de la nation islandaise. En effet, la plaine, et en particulier la zone à proximité de la faille Almannagjá, est le lieu originel de rassemblement d'un des plus vieux parlements du monde, l'Alþing, qui y fut fondé dès 930, moins d'un siècle après le début de la colonisation de l'Islande.

Ce site est ainsi le témoin des grands changements qui ont affecté l'île, dont en particulier la christianisation du pays en l'an 1000, mais aussi les conflits politiques à partir de la fin du XIIe siècle conduisant à un transfert progressif du pouvoir vers les grands royaumes scandinaves (Norvège puis Danemark) jusqu'à la dissolution totale de l'assemblée à la fin du XVIIIe siècle. Si l'assemblée ne fut jamais restaurée à Þingvellir, le site reprit rapidement de l'importance comme symbole du nationalisme islandais lors du mouvement indépendantiste du XIXe siècle. En 1930, lors des célébrations du millénaire du parlement, ce site historique est déclaré premier parc national du pays et le 17 juin 1944, c'est ici que la république et la fin de l'union dano-islandaise sont proclamées.

Le parc national est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 2004.

Selon le Landnámabók, la colonisation de l'Islande commence en 874 lorsque Ingólfr Arnarson devient le premier colon permanent en Islande. Durant les années qui suivent, l'île se peuple peu à peu. Initialement, plusieurs assemblées locales sont organisées autour d'un chef (goði). Mais les colons viennent d'horizons différents (tels que la Norvège, l'Écosse, l'Irlande) et ont donc des coutumes différentes. De plus, les assemblées n'ont pas forcément de lien familial pour en assurer la cohésion et, au contraire, des familles pouvaient être dispersées à travers le pays. Enfin, les descendants de Ingólfr Arnarson dominent le Sud-Ouest de l'Islande et sont devenus la famille la plus puissante d'Islande, de sorte que les autres chefs ressentent le besoin de limiter l'expansion de la puissance de cette famille. Ainsi, à mesure de la croissance de la population, il devient évident que l'île a besoin d'une assemblée générale. L'État libre islandais est fondé.

Peu avant 930, les chefs islandais envoient un homme nommé Úlfljótr en Norvège, dans le but d'étudier la loi du Gulaþing. Il revient en Islande avec la loi qui portera son nom : Úlfljótslög (« loi d'Úlfljótr »). Son frère adoptif Grímr Geitskór est désigné pour trouver un endroit convenable où tenir l'assemblée.

Le site archéologique de Þingvellir

Au même moment, un fermier qui habitait à Bláskógar (qui était alors le nom de la région de Þingvellir) est déclaré coupable de meurtre. Sa condamnation consiste au paiement d’une amende et à l’abandon de ses terres. C’est sur ces terres, qui deviennent propriété publique, qu’on décide d’établir l’Alþing, assemblée composée de 36 chefs locaux, qui se réunit pour la première fois en 930. Cette région rassemble tout ce dont l'assemblée a besoin (du bois pour le feu et une prairie pour les chevaux) et est facilement accessible des régions les plus peuplées. Le goði le plus éloigné, dirigeant l'est du pays, doit voyager durant 17 jours, les montagnes et rivières formant d'importants obstacles.

Le seul aménagement nécessaire est le détournement de la rivière Öxará vers la plaine, afin d'approvisionner le site de l'assemblée en eau.

Le parlement se réunit pendant environ deux semaines, autour du solstice d'été. La place centrale de ces événements est le rocher de la loi (Lögberg). La localisation exacte du rocher en question est soumise à débat, un possible site étant Hallurinn, mais il est aussi possible que cela soit la faille d'Almannagjá. Chaque assemblée commence avec une procession vers ce lieu et c'est là que sont faites les annonces publique. C'est aussi là que le diseur de loi (Lögsögumaðr) récite chaque année un tiers de la loi, afin de les garder en mémoire. Il faut en effet attendre 1117-1118 pour que ces lois soient mises à l'écrit, dans un texte appelé Grágás. Un autre site important est le conseil des lois (Lögrétta), qui au XIIIe siècle est devant le rocher de la loi, mais qui était probablement ailleurs auparavant. Ce conseil est constitué probablement d'autour de 150 hommes, dont une quarantaine de goði.

C'est le conseil qui doit établir les lois, mais aussi régler les disputes. Enfin, la dernière institution de l'Alþing est les cinq cours, une pour chacune des quatre divisions du pays (ouest, nord, est et sud) et une pour le pays entier. Le rôle des cours est aussi de régler les conflits : dans les quatre cours locales, il faut un accord des 36 juges pour prendre une décision, et en cas d'absence de consensus, c'est la cour nationale qui juge à la majorité.

C'est donc en ce lieu que sont prises toutes les décisions importantes. C'est en particulier le cas pour la christianisation de l'Islande. Ainsi Gissur le blanc et Hjalti Skeggjason, deux goðar convertis et ayant promis au roi norvégien Olaf Tryggvason d'évangéliser le pays, s'expriment en l'an 999 ou 1000 lors de la session de l'Alþing.

Le diseur de loi païen Þorgeir Þorkelsson est chargé de prendre la décision, et, le lendemain, il annonce au rocher de la loi que l'Islande devient chrétienne, mais que les anciennes traditions sont conservées et que le culte païen peut être exercé en privé. La première église de Þingvellir est construite peu de temps après. Elle est, semble-t-il, assez grande et richement ornée, gage de son importance. Dès lors, c'est ici que se tient le conseil en cas de mauvais temps. Juste à côté de l'église se trouve la demeure de l'évêque de Skálholt, qui dirige le conseil à partir de la christianisation.


La ferme de Stöng (Þjóðveldisbærinn), reconstituée

En périphérie des sessions de l'Alþing, Þingvellir devient un lieu plein de vie pendant ces deux semaines, avec probablement 500 fermiers sur les 4 000 que compte l'île. Il y a aussi des tanneurs, des brasseurs, des marchands, des clowns. Durant ces deux semaines, Þingvellir devient une sorte de capitale. En particulier, le site tient une place très importante dans la culture médiévale islandaise.


Reconstitution à Eiríksstaðir

Les habitations de l'époque sont construites avec des murs en pierre et tourbe, typiquement dans un style de maisons longues vikings.

Les habitats sont bien visibles sur "Google Maps"

Il existe plusieurs descriptions du site de Þingvellir alors qu'il était encore utilisé, l'un d'elles datant du début du XVIIIe siècle, décrivant le conseil des lois et 18 cabanes, et plusieurs cartes du site datant de la fin du siècle. Les recherches archéologiques quant à elles débutèrent dans la seconde moitié du XIXe siècle, avec Sigurður Guðmundsson, artiste et passionné d'archéologie, puis en 1880 avec les premières fouilles menées par Sigurður Vigfússon, pionnier de l'archéologie en Islande. Ce dernier s'intéressa en particulier aux structures de Spöngin, découvrant une structure circulaire à proximité de ce qu'il interprétait comme le Lögberg historique, et un mur en tourbe.

Il fit quelques fouilles dans les ruines de plusieurs cabanes dont la cabane de l'évêque (Biskupabúð), qui avait une structure très similaire aux maisons longues vikings, ainsi que Njálsbúð et Snorrabúð. Enfin, il étudia la structure de Lögberg, au sommet de Hallurinn, et trouva en particulier une épaisse couche de cendres sous la structure artificielle, révélant que le site était utilisé avant la construction de cette plateforme. Une seconde série de fouilles, plus extensive, commença en 1920 et s'étala jusqu'en 1945, sous la direction de Matthías Þórðarson. En 1957, alors qu'un câble électrique était installé à travers le champ de lave, un objet décrit comme l'extrémité d'une crosse épiscopale en T fut découvert, ce qui motiva une fouille locale.

Mais l'archéologie moderne ne commence qu'entre 1986 et 1992 avec un recensement total de tous les vestiges visibles sur le site, révélant un site beaucoup plus étendu et complexe qu'envisagé précédemment (soit des fragments de quelque 50 cabanes de tourbe et de pierre. Il devrait subsister des vestiges du Xe siècle enfouis sous terre). Ces recherches montrent aussi que les changements du paysage du site dans le passé, en particulier le cours de la rivière, peuvent potentiellement compliquer la tâche des archéologues.

Ces travaux forment la base du rapport envoyé à l'UNESCO pour l'inscription au patrimoine mondial. Plusieurs recherches ont eu lieu depuis, en particulier entre 1998 et 2005 par l'Institut d'archéologie (Fornleifastofnun Íslands) et le musée national d'Islande (Þjóðminjasafn Íslands). Ces recherches mettent au jour des structures plus anciennes souvent bien plus vastes que les structures plus récentes qui les ont remplacées, conséquence de la diminution historique de l'influence de l'Alþing.

En plus d’être un site historique important, la plaine de Þingvellir se trouve à cheval sur deux plaques continentales, la plaque européenne et l’américaine.

Les deux plaques s’écartent l’une de l’autre à une vitesse moyenne de 5mm par an, ce qui explique l’aspect particulier de la plaine qui semble se déchirer.



Þingvellir, 801, Selfoss, Islande

Accès libre


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