Le trophée guerrier de l'oppidum de Corent
Antérieur à la Bataille de Gergovie, ce trophée guerrier a été retrouvé sur l’oppidum de Corent, autre site arverne majeur situé à quelques kilomètres de Gergovie. Ce dépôt métallique exceptionnel se compose de plusieurs objets en fer et en alliage cuivreux dont l’association est identifiée aux vestiges d’un trophée d’armes exposé à l’origine contre le mur d’enceinte du sanctuaire. Initialement, le trophée d’arme était constitué d’un présentoir anthropomorphe supportant une cotte de mailles, quatre boucliers, une ou plusieurs épées ainsi qu’une enseigne militaire en forme de sanglier. Il correspond à la consécration, au sein du sanctuaire de la cité, d’armes gagnées sur l’ennemie à l’occasion d’un événement militaire dont il convenait de garder le souvenir.
Datation : Fin du IIème siècle avant J-C
Découverte : Sondage Garcia 2009, oppidum de Corent – Veyre Monton (Prêt du Département du Puy-de-Dôme)

Des travaux d’aménagement en cours sur le sanctuaire gaulois de Corent en Auvergne, conduits par le Conseil Général du Puy-de-Dôme, sont à l’origine d’une découverte inattendue : un dépôt regroupant plusieurs armes en fer, un élément d’enseigne-sanglier en bronze et une cotte de mailles en fer pratiquement intacte, vestiges d’un trophée militaire exposé dans l’enceinte du sanctuaire...

Fidèles à leur réputation de farouches guerriers, les Gaulois portaient un intérêt tout particulier au butin pris à leurs ennemis vaincus. Prélevées sur le champ de bataille, armes et dépouilles étaient soigneusement collectées et exposées dans les principaux sanctuaire du territoire, où se tenaient les assemblées militaires et politiques. Découvert en 1993, le sanctuaire arverne de Corent est reconnu comme le premier lieu de culte de cette importance mis en évidence au sud de la Seine. Fouillé aux trois quarts de sa surface entre 2001 et 2005, on pouvait supposer qu’il avait livré tous ses secrets. Une découverte inattendue vient pourtant d’y être effectuée fin septembre, dans le cadre d’un projet d’aménagement et de valorisation des vestiges porté par le Conseil Général du Puy-deDôme, propriétaire des terrains depuis 2007.

L’implantation, sur ce site archéologique particulièrement sensible, de structures d’accueil du public a nécessité une surveillance attentive des travaux de terrassement. La direction des opérations, assurée par le Laboratoire Universitaire d’Enseignement et de Recherche en archéologie Nationale (LUERN), a été confiée à Magali Garcia, doctorante à l’université Lumière Lyon 2. Un sondage de quelques mètres carré, ouvert sous la galerie maçonnée d’époque romaine, a mis au jour un amas compact d’objets en fer, dont la plupart ont été identifiés après nettoyage.

Quatre coques ou « umbos » en fer, fixées à l’origine sur de grands boucliers en bois, une barre de fer allongée correspondant peut-être à une lame ou à un fourreau d’épée, y côtoient une masse de fer compacte et très corrodée, préservée sur plus de quatre-vingt centimètres de longueur. La surface de l’objet, replié en plusieurs couches, laisse transparaître des rangs de mailles, caractéristiques d’un vêtement de protection constitué de milliers d’anneaux métalliques étroitement imbriqués. La découverte d’une cotte de mailles gauloise, équipement de prestige réservé aux plus hauts membres de l’aristocratie, est exceptionnelle. On recense, en tout et pour tout, une vingtaine d’occurrences dans toute l’Europe celtique, le plus souvent sous forme de fragments isolés.

La cotte de Corent présente un état de conservation incomparable, puisqu’elle semble pratiquement intacte. Son étude, qui prendra de longs mois, apportera de précieuses informations sur la conception et le port de cet équipement, dont l’invention est créditée par les textes anciens aux forgerons gaulois. À proximité immédiate de ce dépôt gisait une grande pièce en bronze comportant un fin décor ajouré, caractéristique de l’art celtique de la fin de l’âge du Fer.

On peut l’identifier à la crête d’une grande effigie de sanglier en tôle de bronze, comparable à celle découverte en 1989 à Soulac-sur-Mer.
Réplique du Sanglier-enseigne découvert à Soulac-sur-mer et d'un carnix de Tintignac. Bibracte

Montée à l’origine sur une longue hampe, elle correspond à un type d’enseigne militaire attesté en Gaule par quatre ou cinq exemplaires seulement. À ce dépôt groupé s’ajoute la découverte, dans un autre sondage ouvert quelques mètres plus loin, de deux bagues en or d’un type très rare. La découverte de ces objets enchevêtrés constitue une première à l’échelle du territoire arverne. Toutes proportions gardées, elle revêt une importance comparable à celle du dépôt découvert en 2002 sur le sanctuaire de Tintignac en Corrèze, qui partage plusieurs points communs avec celui de Corent. Une première hypothèse quant à l’origine de ce dépôt est suggérée par le choix et la disposition des objets qui le constituent.

Leur fonction militaire et leur contexte laissent à penser qu’il s’agit de pièces de butin, arrachées à l’ennemi et exposées dans le sanctuaire. Dans l’antiquité, les représentations de trophées militaires présentent presque toujours l’aspect suivant : une armure ou une cotte de mailles disposée à la manière d’un mannequin, sur un châssis de bois, dont les bras brandissent deux paires de boucliers opposés. Ce dispositif est généralement complété par un faisceau de lances, une trompe de guerre ou… une enseigne sanglier en bronze. L’assemblage d’objets qui caractérise l’amas de Corent suggère un dispositif identique, mettant en scène des équipements militaires complets accrochés sur un poteau ou suspendus au mur d’enceinte du sanctuaire.

Cette pratique est explicitement attestée par l’écrivain romain Plutarque, lorsqu’il signale l’existence d’un glaive accroché en guise de trophée dans un temple et vénéré par des guerriers Arvernes qui se targuaient de l’avoir arraché à Jules César en personne !
Visité en 2021.
Plateau de Gergovie, 63670 La Roche-Blanche
Accès payant
Sources:
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