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Le Point de Vue du Camp de Chailly

Tel l'étrave d'un navire fendant la mer, l'extrémité ouest du Rocher du Cuvier Chatillon est un promontoire qui domine de plus de cinquante mètres la vaste plaine de Chailly, plaine occupée en 1840 par un camp militaire. La position surélevée du site semble avoir été appréciée pour ses qualités défensives dès l'époque préhistorique.

En effet en 1905, le Dr LENEZ, lors d'une promenade avec sa fille, signale la découverte de silex taillés sur le plateau terminal de la platière, notamment des lames à dos abattu et une petite pièce en forme de croissant. Ce matériel ressemble aux pièces décrites par d'autres archéologues comme appartenant à l'époque mésolithique, c'est-à-dire l'extrême fin de l'âge de la pierre taillée, lequel précède celui de la pierre polie, ou "néolithique", et son cortège de découvertes technologiques : agriculture, élevage, poterie, tissage er autres.

Cette époque mésolithique, que l'on situe dans notre région encre 4000 et 6000 avant notre ère, est caractérisée par des peuplades vivant dans des abris précaires, huttes ou grottes, récoltant plantes, baies ou graines qu'ils pouvaient trouver, pêchant lorsque les cours d'eau le permettaient et chassant de petits animaux comme les lapins ou les oiseaux, car les rennes avaient migré vers le nord à la fin de la dernière période glacière autour du dixième millénaire. Leur matériel de chasse ne nécessite alors plus de gros outillages et de petits silex tranchants viennent armer les flèches ou les harpons, silex taillés que l'on retrouve abondamment dans les sites. On parle ainsi de "microlithes".

Microlithes au musée de Préhistoire d'Île-de-France à Nemours

En 1934, Alexis CABROL et Henri PAURON lisent une communication, lors d'une réunion de la Société préhistorique Française, dans laquelle ils signalent qu'à l'occasion d'un classement de dossiers, ils ont été attirés par la publication du Dr Lenez et ont consacré leurs loisirs de retraités à l'exploration du gisement. Ils pratiquent une douzaine de sondages sur le plateau puis une fouille sur le rebord nord qui met à jour, dans la couche de sables rougeâtres qui recouvre la table de grès, outre des nucléus et des lames brutes de débitage, de nombreux outils comme des grattoirs ou des lames recouchées.

Certaines pièces sont très petites, constituées par des trapèzes, des triangles ou des croissants et, ce que l'on a nommé autrefois, des micros burins. Cet outillage est typique du Tardenoisien, période du Mésolithique qui remonte dans notre région à 4-6000 ans avant notre ère. Or trois abris gravés sont connus à proximité de ce site et un rapprochement a très vite été effectué : les gravures remonteraient-elles à cette époque ?

À la suite de la disparition en 1968 de l'archéologue bellifontain Réginald LHOSTE, Jean GALBOIS, président du Groupe Archéologique de la Région de Fontainebleau ( GARF), effectua des recherches dans ses collections et y découvrit quatre pièces en silex et cinq en grès qui émanaient du site du point de vue du Camp de Chailly et dont certains bords étaient émoussés. Ces pièces, découvertes dans une petite cavité géodique située entre les deux derniers abris, avaient plus que vraisemblablement servi à exécuter certaines des gravures. Par la suite, Jacques HINOUT affirmera avoir trouvé de tels gravoirs au même endroit.

Ces instruments ont d'ailleurs été retrouvés dans ou devant un certain nombre d'abris gravés de la région et, lorsqu'ils sont constitués d'éclats de silex analogues à ceux trouvés en milieu mésolithique, établissent un lien indirect entre cette période et les gravures. Nous sommes donc en présence d'une part d'une présomption par la proximité de sites mésolithiques et d'abris gravés et, d'autre part, d'une relation indirecte par l'existence d'instruments souvent constitués d'éclats de silex de cette époque ayant servi à exécuter des gravures.

Ces rapprochements laissent subodorer l'ancienneté de certaines d'entres-elles. Une relation directe sera fournie en 1981 lorsque J. Hinout fouillera la Grotte à la Peinture de Larchant et trouvera un bloc gravé enclos dans une couche archéologique mésolithique. Ce qui ne veut pas dire, bien sûr, que toute gravure du massif date de 6000 à 8000 ans.

Ces abris anciennement appelés "abris du Point de vue du Camp de Chailly" sont dénommés aujourd'hui "abris du Bas Bréau".


On peut admirer les gravures – en ne touchant qu’avec les yeux !

Visité en 2022.


Forêt de Fontainebleau


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