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Le baptistère Saint-Jean de Poitiers

Le baptistère Saint-Jean situé à Poitiers est un des plus anciens monuments chrétiens dont l'origine remonte à la deuxième moitié du IVe siècle, début du Ve siècle. Fortement remanié au cours des siècles, il est le bâtiment qui illustre le mieux la dépendance de l'architecture mérovingienne avec ses assises antiques mais aussi l'abandon des principes classiques .

Au IVe siècle, le christianisme se diffuse dans la région et le premier évêque attesté de Poitiers est Hilaire (av. 355-368). Le baptistère Saint Jean actuel remonte vraisemblablement au Ve siècle, mais a subi huit transformations majeures entre le Ve et la fin du XIe siècle. Malgré ces nombreux remaniements, l’édifice est l’un des baptistères les plus anciens conservés en Occident.

Il faisait partie durant le haut Moyen Âge d’un complexe épiscopal constitué essentiellement de la cathédrale et de la résidence de l’évêque. Puis il fut transformé en église placée sous le vocable de Jean-Baptiste qui baptisa le Christ dans le Jourdain. L’édifice resta la propriété du siège épiscopal mais servit aussi d’église paroissiale au moins à partir du XIIe siècle. Et à la période moderne, il fut utilisé comme salle de réunion du chapitre cathédral. Vendu comme bien national en 1790, le baptistère Saint-Jean échappe à la démolition en 1796. Avec l’aide de Prosper Mérimée, les érudits poitevins le sauvent de la destruction lors du percement de la rue Jean-Jaurès. Acquis par l’État en 1830, il fut classé au titre des Monuments historiques en 1834 puis restauré par Charles Joly-Leterme.

Il est confié à la Société des antiquaires de l’Ouest dans les années 1880 qui y expose ses collections lapidaires mérovingiennes. Les éléments les plus anciens du bâtiment datent du Ve siècle. Ce baptistère a remplacé une salle baptismale édifiée au tournant des IVe –Ve siècles, elle-même construite à l’emplacement des bains privés d’une maison antique. Bien que l’archéologie ne puisse le prouver, le bassin antique retrouvé a pu servir de premier lieu de baptême car l’on baptisait à Poitiers dès l’épiscopat d’Hilaire. L’édifice a d’abord été formé d’une salle prolongée par une petite abside rectangulaire destinée au siège de l’évêque et aux clercs.

Dans la partie orientale de la salle, au centre, avait été aménagée la piscine pourla pratique du baptême par immersion. Au VIe siècle, le bâtiment est modifié : l’abside orientale est agrandie ; le vaisseau est divisé en deux salles et précédé d’un porche d’entrée. Au VIIe siècle, afin d’individualiser les espaces (la salle baptismale, l’abside et le porche), les murs sont rehaussés et remaniés avec un petit appareil allongé remarquable, associé à un décor monumental constitué de sculptures en méplat, d’arcades et de bandeaux. À la période carolingienne, le mur qui sépare les deux salles est reconstruit avec ses trois ouvertures.

Au XIe siècle, après un incendie, la salle occidentale et le porche sont remplacés par la salle actuelle à pans coupés. Les fenêtres sont transformées en oculi (fenêtres rondes) ; l’entrée de la salle orientale est monumentalisée, puis des peintures murales romanes et gothiques viennent plus tard décorer les parois.

Le baptistère présente une silhouette insolite. Il se compose d’un volume central quadrangulaire renfermant la salle baptismale et d’une salle polygonale servant d’entrée, à l’ouest. Au cours du XIXe siècle, ont été aménagées les douves sanitaires maçonnées autour de l’édifice. Les absidioles latérales ont été entièrement refaites. À l’extérieur, au niveau du petit appareil allongé et des frontons, les décors de feuillages stylisés, de croix, de motifs géométriques sculptés dans des plaques triangulaires et en demi-cercles ainsi que sur les pilastres représentent un précieux et rare témoin de l’art mérovingien.

L’entrée s’effectue aujourd’hui par la salle occidentale édifiée au XIe siècle, mais la porte d’accès de l’édifice d’origine se trouvait sous le petit pont car, du Ve au XIe siècle, les niveaux de sol extérieurs ont considérablement été rehaussés. À l’intérieur de la première salle, trois grands arcs carolingiens, repris à la période romane, mettent en valeur l’accès à la salle baptismale. Celle-ci, très haute et charpentée, conçue comme un écrin de la piscine qu’elle abrite, possède un décor monumental d’arcades avec des arcs en mitre à la manière antique, de colonnes et de chapiteaux qui sont des remplois datant de l’Antiquité tardive ou du Haut Moyen Âge. Au centre se trouve la piscine de forme octogonale, de 2,10 m de diamètre et de 0,80m de profondeur. On y descendait par deux marches dont on voit encore des vestiges. Si le fond du bassin a été cassé en 1820, les systèmes de canalisation, d’alimentation en eau et d’évacuation du bassin sont en partie conservés dans la crypte archéologique.

À l’origine, la piscine devait être surmontée d’un baldaquin de pierre. Elle fut certainement comblée à l’époque carolingienne lorsque le baptême par aspersion a remplacé les immersions, le nombre de baptêmes se développant. Il n’était plus depuis longtemps réservé aux adultes. Les jeunes enfants étaient présentés par leurs parents. Par ailleurs, à partir des Xe – XIe siècles, le sacrement du baptême était administré sur les fonts baptismaux des églises paroissiales. Malgré la désaffection que cela entraîna pour les baptistères paléochrétiens, l’évêque garda ici la mémoire de ses privilèges en matière de baptême, et l’attachement de l’Église de Poitiers à son vieux baptistère se manifeste par des décors constamment renouvelés.


LE BAPTISTÈRE : UN MUSÉE LAPIDAIRE

Propriété de la Société des antiquaires de l’Ouest, la collection lapidaire mérovingienne présentée dans le baptistère est exceptionnelle. Elle comporte une centaine de couvercles et cuves de sarcophages trapézoïdaux découverts au XIXe siècle dans des nécropoles mérovingiennes de la région parle Père de la Croix, en particulier Antigny, mais également Béruges, Breuil-Mingot, SaintPierre-de-Maillé, Saint-Pierre-les-Eglises, Poitiers, Rom et Savigné.

S’y adjoint, entre autres, le moulage de l’épitaphe d’Aeternalis et Servilla, plus ancienne inscription chrétienne du Poitou conservée à Civaux.

Produits dans la région, les sarcophages portent sur leur cuve la trace des outils ayant servi à extraire la pierre en carrière puis à tailler le bloc pour lui donner sa forme définitive.

Leur couvercle est en général orné soit d’un décor simple, à bande transversale, typiquement poitevin, soit avec des compositions plus ou moins complexes à base de motifs géométriques (comprenant croix et rouelles), végétaux ou zoomorphes (oiseaux affrontés par exemple), gravés en méplat.

Au fond de l’abside orientale se trouvent les exemples les plus richement ornés, provenant d’Antigny, datés de la première moitié du VIIe siècle. Plusieurs couvercles portent le nom gravé du défunt (homme, femme ou enfant), et parfois, une courte phrase en latin mérovingien, rappelant la propriété de la pierre ou l’interdiction de la retourner.

La collection est complétée par une table d’autel carolingienne, découverte à Vouneuil-sous-Biard et présentée au centre de l’abside.

Elle porte encore quelques noms inscrits légèrement à la pointe pour servir de support à une pratique liturgique commémorative.

Visité en 2020.



Rue Jean-Jaurès, 86000 Poitiers

Accès payant


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