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Restauration ou reconstitution?

Suite à la découverte d’objets mycéniens en Crète, certains savants supposent que c’est sur cette île que la civilisation mycénienne serait née. Dès 1878, Minos Kalokairinos, un érudit crétois, attire l’attention des chercheurs sur le site de Cnossos, la ville homérique la plus célèbre, et c’est Arthur Evans, conservateur de l’Ashmolean Museum d’Oxford et ancien journaliste, qui obtient en 1900 l’autorisation de fouiller le site.

Durant six ans, Evans, avec une équipe pluridisciplinaire et jusqu’à trois cents ouvriers, met au jour un palais à l’architecture complexe. Une civilisation inconnue apparaît à Cnossos et sur d’autres sites fouillés dans l’île : palais, maisons, nécropoles, sanctuaires, colonnes, objets et fresques d’une modernité surprenante, et des tablettes portant des inscriptions en trois écritures différentes… Evans fait remonter cette civilisation « crétoise » au XXe siècle avant. J.-C. : c’est alors la plus ancienne connue en Europe et il décide de l’appeler « minoenne », du nom du roi mythique de Crète, Minos. S’appuyant sur les vestiges architecturaux, les

objets et les fresques, il reconstitue, et invente parfois, une société dominée par un roi-prêtre, puissante sur mer, pacifique sur terre et adoratrice d’une déesse-mère.

Sûr de lui, il fait abondamment restaurer les fresques et les ruines de Cnossos : c’est la part la plus contestée de son œuvre, car les interventions architecturales réalisées en ciment armé sont aujourd’hui difficilement réversibles.

Le palais de Cnossos a révélé de nombreuses fresques, réalisées par des équipes de peintres expérimentés. Elles étaient présentes dans les pièces d’apparat, comme les appartements « du Roi » ou « de la Reine », et aux entrées du palais. Les sujets en sont variés : on y découvre le goût des habitants du palais pour des représentations harmonieuses de la nature et des animaux, mais aussi des cérémonies religieuses. Ces fresques ont parfois été abusivement restaurées par Emile Gilliéron et son fils, mais constituent le socle sur lequel Evans s’est appuyé pour imaginer le monde des Minoens. Un monde pacifique où des hommes bleus cueillaient du safran…

On sait aujourd’hui qu’il s’agit d’un singe et non d’un homme qu’il faut voir sur cette fresque, où l’on distingue la queue du singe sur la droite.

Fragments du relief dit « le Prince aux fleurs de lys »

Ces fragments ont été découverts en 1901 et Émile Gilliéron fils a essayé d’en proposer une reconstitution en les reliant entre eux. Cela donna la figure du « Prince aux fleurs de lys », un jeune homme vêtu simplement d’une ceinture, coiffé d’une couronne de fleurs et de plumes de paon, et portant un collier de fleurs de lys. Sous la plume d’Arthur Evans, ces fragments, qui à l’origine, même pour lui, n’appartenaient pas au même personnage, sont devenus la représentation d’un roi-prêtre s’avançant dans un jardin en tenant un griffon.

Cette chimère est désormais l’un des symboles de la civilisation minoenne. La restauration fut faite en se basant sur l’existence d’autres fresques minoennes. Elle fut ensuite remaniée à diverses occasions par différentes personnes. D’autres reconstitutions furent proposées au cours du XXème siècle. On y vit successivement la fresque d’une jeune fille pré-pubère, d’un boxeur et du roi Minos lui-même. Quoi qu’il en soit, lorsque l’on contemple la fresque aujourd’hui exposée au musée archéologique d’Héraklion (une copie se trouve également sur le site du palais de Cnossos), il parait bien difficile de se faire une idée précise de ce à quoi pouvait réellement ressembler cette fresque dont seuls trois morceaux ont été retrouvés.

Malgré ces incertitudes et ces restaurations critiquées, Cnossos reste une merveille archéologique empreinte de la passion d’un homme qui souhaitait lui redonner vie.

Pour les visiteurs en mal d’authenticité, d’autres vestiges de palais crétois sauront faire leur bonheur comme les palais de Phaistos, Hagia Triada et Malia.

Knossos Avenue, Héraklion, Crète, Grèce

Accès payant

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