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L'arc de triomphe d'Orange

L’arc d’Orange est le triomphe de l’impérialisme romain !

L’origine des arcs de triomphe est attribuée généralement à un rite et plus précisément aux portes construites à l’entrée des villes romaines. Ce type de constructions, spécialement érigées pour la circonstance, avait pour but de marquer le retour triomphal d’un général et de son armée. L’Arc de Triomphe d’Orange n’évoque pas un triomphe en particulier mais symbolise la suprématie de Rome sur mer comme sur terre.

Probablement érigé vers l'an 20 de notre ère, l'Arc se dresse dans l'axe du cardo, sur la via Agrippa (actuelle RN7), à l'extérieur des remparts de prestige (donc sans valeur défensive) qui entouraient Arausio, dans l'enceinte sacrée du pomerium. Il est donc orienté Sud-Nord. On parle couramment de l'Arc de triomphe d'Orange : en réalité, il s'agit d'un arc commémoratif, un monument municipal célébrant la conquête romaine. Bien qu'il ait été ultérieurement dédié à l'Empereur Tibère, il a probablement été édifié en l'honneur de son fils adoptif Germanicus, général extrêmement populaire et mort en 19. L'érection de l'Arc correspond également à une période de soulèvements au sein de tribus locales, et il permet en même temps aux Romains d'affirmer leur puissance.

L'arc est construit en blocs de calcaire de grand appareil, posés à joints secs et assemblés par des agrafes, visibles sur l'un des côtés du monument. Il repose sur des pieux car il a été bâti sur un terrain marécageux où coulait autrefois l'Aigues, détournée par les ingénieurs romains. D'une hauteur de 19.57 m pour 19,21 m de large et 8,5 m de profondeur, il s'agit d'un arc à trois portes : une grande baie voûtée au centre, encadrée par deux petites.

Ce monument présente la particularité unique d'être constitué de deux attiques reposant sur un étage inférieur et d'être entièrement sculpté, sur les façades comme sur les côtés, ce qui renforce l'image forte que les Romains souhaitaient véhiculer auprès des rebelles. L'attique supérieur supportait un quadrige de bronze recouvert d'un enduit doré qui en conservait l'éclat. Affirmation de la puissance romaine, l'arc d'Orange demeure un monument impressionnant et il a conservé toute la splendeur de ses décors. Si l'ornementation se décidait à Rome, les reliefs ont été exécutés à Orange, directement sur les murs, par des artistes expérimentés si l'on en juge par la qualité des œuvres.

Les grandes façades présentent donc trois portes, encadrées chacune de colonnes corinthiennes cannelées. Elles sont couronnées de chapiteaux corinthiens et les archivoltes sont ornées de motifs végétaux (fleurs, fruits, etc.) Au-dessus des deux petites arches se trouvent des panneaux en haut-relief représentant des crânes et un amas de dépouilles militaires (armes, lances, boucliers, faisceaux, enseignes...), commémorant la victoire des Romains sur les tribus gauloises. Ces armes ne sont pas celles de guerriers gaulois au sens strict, mais appartiennent à des Gaulois romanisés.

Au-dessus, les attiques présentent de nouvelles sculptures en relief, figurant des dépouilles navales. On peut y voir différentes pièces de navire : proues ornées de l’œil apotropaïque, tridents, avirons, ancres, cordages, etc.

Les éléments de la composition ont été sculptés en intégralité et se superposent les uns aux autres. Cette accumulation d'épaisseur et le soin apporté aux détails donnent à l'ensemble une impression de profondeur.

Sur la façade Nord apparait également, sur le côté de l'attique, un décor constitué d'objets de divination.

Les socles centraux du second attique montrent des scènes de bataille entre Romains et Barbares. Les premiers sont en nette supériorité numérique et sont représentés à cheval, tandis que les seconds sont à terre. Sur la façade Nord, on remarque un personnage à gauche, portant un uniforme d'officier et un bouclier orné d'une tête de Capricorne : il s'agit du symbole de le IIème Legio Augusta. Une fois encore, la finesse des détails est stupéfiante : reliefs accentués par le contour des sculptures, expressivité des visages, corps révulsés, confusion de la bataille animent la scène et donnent vie aux combats.

A noter : la grande voûte de l'arche de passage est décorée de caissons hexagonaux en forme de nids d'abeille, qui inspireront plus tard les architectes du Palais Farnese.

Les petites façades comportent également quatre colonnes corinthiennes chacune (deux d'entre elles communes avec les grandes façades - soit 12 colonnes pour l'ensemble de l'Arc.) Entre ces colonnes figurent trois panneaux illustrés d'un couple de Gaulois - un homme et une femme - enchaînés à l'arbre portant les dépouilles. Deux captifs se tiennent debout, au pied d'un support cruciforme auquel sont accrochés une tunique et un manteau, des boucliers de chaque côté de la barre transversale et un casque au sommet. Des enseignes et des lances apparaissent en arrière-plan.

Carnyx, sorte de trompette utilisée lors des guerres celtes pour contribuer à effrayer l’ennemi et pour mener les troupes (musique d'ordonnance) et enseigne gauloise au sanglier

La façade Est ayant été mieux conservée, on peut y voir un fronton creusé en une sorte de niche, où est représentée une divinité laurée (Apollon), entourée d'étoiles. L'ensemble est surmonté d'un couple de sirènes, disposées de chaque côté du fronton.

Enfin, la frise d'entablement qui court sur les quatre côtés du monument, est ornée d'un relief aux contours cernés (technique de Pergame) montrant plusieurs duels entre Romains et Gaulois - les premiers étant toujours vainqueurs. Plus largement, cette frise illustre la supériorité des Romains sur les Barbares. Les Gaulois sont nus, portent les cheveux longs et parfois la barbe, et ils sont armés d'un bouclier ; les Romains sont casqués et vêtus d'une tunique ou d'une cuirasse. La sculpture est de facture moins subtile que celle des socles centraux des grandes façades : plus grossiers, les traits manquent de finesse et les proportions ne sont pas toujours respectées.

Sur les deux grandes façades, l'architrave portait la même inscription, aujourd'hui disparue, mais que l'on a pu reconstituer à partir de la découverte d'une seule lettre de bronze (un L). Plusieurs hypothèses ont été émises, mais les spécialistes s'accordent aujourd'hui sur une même interprétation, du moins pour la première ligne :

TI. CAESAR. DIVI. AUGUSTI. F. DIVI. IULI. NEPOTI. AUGUSTO. PONTIFICI. MAXI.

Pour la seconde, deux lectures prévalent :

POTESTATE. XXVIII. IMPERATORI. IXX. COS. IIII. RESTITUTORI. COLONIAE ou ... RESTITVIT. R. P. COLONIAE.

Soit : "A Tibère César, fils du divin Auguste, petit-fils du divin Jules, Auguste, grand pontife, dans sa 28ème puissance tribunitienne, imperator pour la 8ème fois, consul pour la 4ème fois, nouveau fondateur de la colonie" - ou "restitué à celui-ci par la colonie".

On peut donc dater l'inscription de 26 ou 27. Mais dans le premier cas de figure, peut-être s'agit-il de l'envoi de nouveaux colons ou de la distribution de nouvelles terres, alors que la seconde interprétation se base sur l'hypothèse selon laquelle l'Arc aurait été érigé en l'honneur de Germanicus (mort en 19), général de la IIème Legio Augusta dont étaient originaires les vétérans installés à Arausio. Ceux-ci auraient donc souhaité lui rendre hommage et célébrer ses victoires. Tibère n'aurait guère apprécié d'être supplanté par Germanicus, et Arausio aurait cédé aux pressions de l'administration romaine en modifiant la dédicace, lui "restituant" ainsi l'Arc qui lui revenait de droit. Ce qui expliquerait l'emplacement de l'inscription, à un endroit n'étant pas destiné à cet usage et néanmoins retenu à cause de la longueur de la titulature impériale dans la nouvelle dédicace (deux lignes au lieu d'une seule). Toutefois, d'autres soulignent que des Arcs ont été dédiés à Germanicus - y compris à Rome - sans que Tibère n'en fasse une jaunisse... Suite à une rénovation achevée en 2009, le monument a retrouvé toute sa majesté et la splendeur de ses décors, qui en font un des édifices les plus impressionnants de la Gaule romaine. L'arc avait déjà été restauré dès les années 1820 par l'architecte Auguste Caristie, qui commença par dégager les contreforts et ajouts médiévaux, avant de procéder à une reconstitution non agressive du monument, remplaçant les parties inutilisables ou manquantes de façon identifiable et s'interdisant le recours à l'imagination, si fréquent dans les restaurations entreprises par les architectes du XIXe siècle.

Avenue de l'Arc de Triomphe, 84100 Orange

Accès libre

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